Banchô Sarayashiki ou l’histoire d’Okiku et les neufs assiettes

Banchō Sarayashiki(番町皿屋敷) ou l’histoire d’Okiku et les neufs assiettes est un célèbre conte folklorique japonais datant de l’époque Edo. Son origine et sa version exacte sont inconnue. Malgré tout son histoire et surtout son personnage de fantôme continue à hanter influencer le Japon d’Aujourd’hui. Il s’agit d’une histoire universelle de loi du plus fort. Une de ces histoires où l’abus de pouvoir conduit à une fin tragique où les innocents paient le prix. J’ai découvert le personnage de Okiku (la malheureuse héroïne de l’histoire) pour la première fois dans un chapitre du manga Maison Ikkoku (de Rumiko Takahashi) où Kyoko devait se déguiser en Okiku et se cacher dans un vieux puits lors d’un festival de son quartier à l’occasion de l’Obon (fête des morts japonaise). Elle devait susurrer le mot Urameshi (je vous maudit). Rumiko a peut-être été inspiré par la beauté du fantôme de Okiku tel que l’a représenté Yoshitoshi Tsukioka et qui rappelle un peu la beauté de son personnage. La deuxième fois, où j’ai entendu parlé de Okiku, est en faisant des recherches sur des karuta. Sarayashiki (nom donné au fantôme de Okiku) est en effet représenté sur la première carte du jeu d’obake karuta. J’ai donc fait quelques recherches sur ce personnage et j’ai décidé de partager ma version de l’histoire avec vous en me basant sur les différentes adaptations (drama, théatres de marionnettes, livres de contes, kabiku, etc) qui existent.

Histoire

Mukashi mukashi Il était une fois une magnifique jeune femme nommée Okiku. Okiku travaillait comme servante auprès de la demeure (Yashiki) du Samouraï Aoyama Tessan. Aoyama Tessan appréciait la jeune femme pour son travail et l’appréciait encore plus pour sa beauté qui l’obsédait au point de vouloir en faire sa maîtresse. Malgré ses avances répétées, la jeune Okiku refusait d’être infidèle au jeune homme du village à qui elle s’était promise. Aoyama Tessan imagina alors un plan diabolique pour obliger la jeune femme à s’offrir à lui. Il décida de cacher soigneusement une des dix précieuses sara (assiettes) du services de famille en comptant bien accuser la jeune fille du vol. Un vol qui dans ce Japon féodal n’avait qu’une peine : la mort. La jeune femme était donc piégée. Pour mettre son plan machiavélique à exécution, Aoyama Tessan averti la jeune femme qu’il recevait quelques samouraïs le soir même et qu’il voudrait que celle ci prépare la table pour 10 personnes avec les plus belles assiettes. Okiku sorti donc les assiettes et se mit à les compter: « ichimai, nimai, sanmai, yonmai, gomai, rokumai, shichimai, hachimai, kumai, ju… » Elle s’arrêta net. Il n’y avait pas jûmai (10) assiettes. S’était elle trompé en comptant Elle les recompta : « ichimai, nimai, sanmai, yonmai, gomai, rokumai, shichimai, hachimai, kumai. » Elle blêmit. Elle les recompta encore et encore et encore. Mais elle avait beau les compter, pas de dixième assiette. Elle fondit en larme et se rendit dans la chambre de son maître Aoyama Tessan afin de l’avertir. Aoyama Tessan se montra compatissant envers la jeune femme et lui proposa d’oublier cette affaire… à condition bien sûr qu’elle devienne sa maîtresse. Mais c’était sans compter sur la fidélité de la jeune femme envers son fiancé. Aoyama Tessan alors se mit en rage et accusa la jeune femme du vol de l’assiette. D’un bond, il  se leva pour chercher son sabre afin de tuer la jeune femme. Okiku apeurée voulu s’enfuir rejoindre son fiancé. Elle sortit de la demeure, et se dirigea vers le portail. En se retournant pour voir son poursuivant, elle ne put éviter la margelle d’un vieux puits, trébucha et tomba au fond de celui ci. L’esprit de la jeune femme n’ayant pu trouver le repos devint un esprit vengeur (Onryô) qui toutes les nuits, au fond de son puit, compte jusqu’à neuf : « ichimai, nimai, sanmai, yonmai, gomai, rokumai, shichimai, hachimai, kumai » avant de se mettre à hurler dans un cri d’agonie face au manque d’une d’une dixième assiette. Peut-être pour tourmenter son ancien maître ou tout simplement parce que son esprit tourmenté ne trouve pas le repos. Alors si vous avez l’occasion au Japon de passer près d’un vieux puits qui vous semble hanté, dîtes à haute voix « jûmai » (dix) afin que l’esprit d’Okiku puisse, peut-être, reposer en paix.

Une estampe réalisé par Hokusai représentant Sarayashiki

Rédigé par : Christophe Bejach